Les baby boomers qui arrivent à la retraite sont aussi surnommés la génération sandwich. Sandwich car ils sont de plus en plus nombreux à venir en aide à la fois à leurs enfants et à leurs parents.
Le soutien aux enfants est principalement d’ordre financier (61% des retraités français aident financièrement leurs enfants) et « logistique » en s’occupant des petits-enfants.
Simultanément, ils endossent aussi parfois un rôle d’aidant en venant soutenir leurs parents qui font face à une perte d’autonomie. Vous découvrirez qu’on ne s’improvise pas aidant. Cet article vous proposera aussi quelques conseils importants.
Qui sont les aidants proches?
Les aidants proches, ce sont donc ces hommes et ces femmes qui consacrent leur temps à soulager dans leur quotidien des personnes en perte d'autonomie. Il s'agit souvent du conjoint, mais parfois aussi d'un enfant, d'un ami ou d'un voisin.
Les personnes aidées sont majoritairement des seniors, ce n’est pas nouveau. En raison de l’allongement de la durée de la vie, cette population va encore croître. Ce que l’on ignore trop souvent, c’est la forte représentativité des seniors comme aidants. Ces derniers sont soit retraités, mais souvent encore au travail. Dans sa récente analyse, la Fondation Roi Baudouin (1) (FRB) a tracé un profil des aidants sur base d’une large étude menée par l’UCL. Le profil est très varié. La FRB distingue les aidants cohabitants (61%) et non cohabitants (39%).
Les premiers sont aussi bien des hommes que des femmes. Ils aident pour 73% d’entre eux le conjoint, ils ont 68 ans en moyenne. 50% des aidants cohabitants ont plus de 70 ans.
Les aidants non cohabitants sont majoritairement des femmes. Ils s’occupent pour 78% d’entre eux des enfants. 60% de ces aidants sont encore au travail.
En moyenne, les aidants consacrent plus de quatre heures par jour à l’aide et aux soins de personnes âgées. Néanmoins, certains atteignent dix heures d'aide par jour, avec tous les risques de coupure que cela peut engendrer par rapport à la société.
En moyenne, un aidant proche permet d’économiser jusqu’à 1000 euros par mois à la sécurité sociale. Cependant, le manque de reconnaissance, de soutien, d’encadrement fragilise cette population qui bien souvent se retrouve aussi en détresse.
Les aidants ont besoin d’être aidés au risque de se retrouver sur la touche.
C’est une triste réalité selon Madame Ducenne de l’Asbl Aidants-Proches (2). Si on ne prend pas la peine de s’entourer, d’être conseillé, aidé, on peut tomber très vite dans un engrenage affectif et relationnel. Beaucoup d’aidants trouvent normal de s’investir de plus en plus chaque semaine (la moyenne est de 75 heures/semaines lorsque la personne aidée a des limitations fonctionnelles et des déficiences cognitives). Ce qui se limitait à un coup de pouce se transforme parfois en sacerdoce. S’en suivent alors des épisodes de culpabilisation qui peuvent même déboucher sur du chantage dans la dyade aidant-aidé, de la maltraitance sans parler de burn-out chez l’aidant. Selon la Fondation Roi Baudouin, 30% des aidants présenteraient des risques de dépression. Chez les aidants cohabitants (dont 53% ont plus de 70 ans), c’est l’isolement social du couple qui est aussi à prendre en compte.
Les aidants encore au travail ne trouvent pas nécessairement un échappatoire dans leur quotidien professionnel. En France, 8 personnes sur 10 qui aident un proche rencontrent des difficultés à concilier leur vie au travail avec leur rôle d’aidant. 43% des travailleurs estiment avoir été freinés dans leur évolution de carrière en raison des contraintes de l’accompagnement (3). Selon la FRB, en Belgique, 8% des aidants ont réduit leur temps de travail.
Quels conseils donner aux aidants?
Nous avons demandé à Caroline Ducenne, coordinatrice de l’ASBl Aidants-Proches, quelques conseils.
Il ne faut pas se lancer tête baissée sans préparation. Il est plus que conseillé de se faire accompagner par un service de médiation par exemple. La première question à se poser est de savoir si on est prêt à le faire. On peut « continuer » à aimer un proche et le lui faire savoir tout en expliquant qu’on ne souhaite pas endosser un rôle d’aidant. Un médiateur peut parfaitement jouer ce rôle et aider à déculpabiliser une personne qui ne désire pas franchir le pas.
Avant de s’engager dans la voie du soutien d’un proche, il faut en discuter avec lui mais aussi avec l’entourage. Il faut mettre à plat toute une série de points importants : le temps consacré, les craintes, etc. L’Asbl Aidants-Proches propose une permanence téléphonique qui s’adresse aussi bien aux aidants déjà actifs qu’aux personnes qui se destinent à le devenir. L’Asbl Aidants-Proches conseille aussi de prendre contact avec sa commune, le CPAS, le service social, les mutuelles (pas nécessairement la sienne) , un service de coordination et de soin, etc. Ces différents acteurs peuvent aussi donner un aperçu des aides et soutiens disponibles. Les centres de répit sont largement sous utilisés. Beaucoup d’aidants ignorent que ces derniers détachent aussi des personnes auprès de l’aidé, ce qui ne nécessite pas d’organiser des déplacements parfois difficiles. Il n’existe pas vraiment de centralisation des aides, mais là aussi l’ASBL peut vous aider.
Quels conseils spécifiques aux aidants qui continuent à travailler ?
Comme mentionné plus haut, beaucoup de travailleurs rencontrent des difficultés à concilier leur travail et leur rôle d’aidant. Les fins de carrière sont souvent difficiles (peur du licenciement) et les aidants ne souhaitent pas nécessairement amputer leur rémunération. Ils hésitent parfois à informer leur employeur de leur rôle d’aidant par peur d’être stigmatisés. Caroline Ducenne conseille cependant d’en parler. Ca rassure l’employeur qui pourrait parfois attribuer une baisse de régime à un manque de motivation plutôt qu’au rôle d’aidant. En dehors de flexibilités que pourrait offrir l’employeur, la loi prévoit plusieurs possibilité d’adaptation du temps de travail : 10 jours de congés pour raisons familiales, le crédit-temps avec motif, le congé thématique, etc. Ici également, votre employeur peut vous informer sur les différentes possibilités offertes.
L’ASBL Aidants-Proches en quelques mots.
La mission de l’Asbl se décline dans les objectifs suivants :
• Identifier les besoins des aidants proches
• Contribuer à la reconnaissance officielle et à l'accès aux droits sociaux pour les aidants proches
• Promouvoir une réelle possibilité de choix
• Rassembler les informations concernant les services et les aides
• Informer sur ces services et ces aides
• Valoriser les aidants proches dans leur rôle de partenaires de soins
L’Asbl envisage de mettre sur pied prochainement une formation à destination des aidants. Ces formations seront aussi bien en groupes qu’individuelles. Enfin, elle propose aussi la « carte urgence aidants proches ». Cette carte portée par les aidants permet à des tiers (secours) d’avertir d’autres soutiens identifiés sur la carte en cas par exemple d’hospitalisation de l’aidant. Vous pouvez vous inscrire à la newsletter de l’ASBL et suivre son actualité via le lien suivant .
Pierre Degand
Sequoia ways
(1) zoom : aidants proches et personnes âgées à domicile
(3) source : opinionway pour le groupe Humanis